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Animation et développement
des territoires
de l'enseignement agricole

L’engagement des jeunes présenté au séminaire Animation et développement des territoires

« Les jeunes au cœur des transitions : de l’engagement aux compétences » est la thématique étudiée aux rencontres de décembre 2022 à la Bergerie nationale. Les expériences de jeunes et d’adultes de l’enseignement agricole ont illustré différents types d’engagement.

 

Sur les quatre projets présentés, des jeunes des EPLEFPA de la Thiérache et de Nevers – Cosne-sur-Loire sont venus donner leur impression et répondre aux questions de l’auditoire. Pour les deux autres exemples, la parole des apprenants était diffusée via des vidéos.

 

 

Des jeunes à l’initiative du projet

Le projet de l’EPLEFPA de la Thiérache est né d’une séquence pédagogique ludique sur le développement durable. Les élèves ont fait le constat de l’absence de recyclage des déchets dans l’établissement. Ils l’ont formalisé par une lettre au proviseur. Six éco-responsables, les agents techniques et une équipe enseignante - dont Nadège Trupin enseignante en biologie-écologie-zootechnie bénéficiaire d’un Tiers temps - ont répondu à cette problématique qui fait sens aux élèves.

 

Les projets ont été présentés aux différentes classes pour mobiliser des volontaires. Un groupe de travail s’est constitué pour décider quelles actions mettre en place. Artur Huber, élève de 1ère STAV à ce moment, fait partie des volontaires et présente ce que lui a apporté cet engagement. Il en retient l’apprentissage du travail en groupe, l’autonomie et des actions nouvelles comme la gestion du budget (financement DRAAF) et l’écriture et le montage d’un film. Le projet étant mené principalement par des élèves hors temps de classe, ils ont bénéficié d’une certaine autonomie et de la confiance des enseignants. Pour Arthur « cette expérience peut nous donner des envies d’engagement dans le futur et nous incite pendant les différents stages dans les exploitations à mettre en place du tri ».

 

Les jeunes ont pu sortir de leur seule posture d’élèves et être acteurs d’actions concrètes. Ils ont rencontré et travaillé avec des partenaires CPIE, Communauté de communes et entreprise de recyclage. Comme le projet est mené par des volontaires hors classe, il n’y a pas eu d’évaluation formelle mais les jeunes ont préparé un jeu sur le tri qu’ils ont animé à l’occasion d’une journée sur l’agroécologie au sein de l’établissement. Pour aller plus loin, ce projet leur a permis de développer la confiance en eux et leur motivation pour de futurs engagements.

Des jeunes dans la gouvernance du projet

Le projet régional Inter’Actions lauréat du CASDAR TAE est à l’origine du projet Pâtur’Ovigne de Nevers – Cosne-sur-Loire. L’objectif était de créer la résilience entre une exploitation grandes cultures et une exploitation élevage. Un comité de réflexion comprenant le directeur d’exploitation agricole, des enseignants techniques des deux filières viticole et élevage a choisi le viti-pastoralisme en créant du pâturage dans les vignes. En effet, le site de Cosne-sur-Loire comprend une exploitation viticole et les formations associées en viticulture ainsi qu’une filière élevage mais sans plateau technique sur place. Céline Texier, enseignante en zootechnie et Damien Giquet, enseignant en agronomie et agroéquipement étaient impliqués dans le projet dès le début, rapidement rejoints par Camille Goguillon, enseignante en zootechnie. L’équipe enseignante a étudié les référentiels pour y insérer les séquences pédagogiques. 

Ce projet a été présenté aux classes de bac pro viticulture et CGEA. Le projet a consisté à introduire des brebis dans une exploitation sans animaux (clôture de la parcelle, construction d’un bâtiment, choix et suivi des brebis et travail sur l’autonomie alimentaire hors période de pâturage dans les vignes). Toutes ces étapes ont été réfléchies et coconstruites avec les élèves, forces de propositions.  

« Ça rentrait dans nos formations pour devenir exploitants » disent Laura Chollet et Corentin Michot anciens élèves du bac CGEA. « On a été maitre du projet avec les enseignants et on a appris notre métier d’éleveur avec une diversification ovine, ça nous ouvre d’autres portes ».  Pour la filière viticulture, ce projet a permis d’expérimenter la gestion de l’enherbement entre les vignes.  

Ce projet a bénéficié à l’établissement par des aspects logistiques avec moins de déplacements pour les travaux pratiques de zootechnie et une adaptation de la progression pédagogique aux animaux. Mais la plus belle réussite pour Damiens Giquet est le lien qui s’est créé entre deux filières distinctes.  

Ce projet casdar est devenu un projet d’établissement « produire autrement » avec toutes les classes. Chaque promotion participe et développe un aspect du projet : pâturage, implantation des cultures pour l’autonomie alimentaire, valorisation des animaux… Selon les années et les besoins, les prestataires varient : éleveurs, prestataires, abattoir ou encore réalisateur vidéo pour la création d’un documentaire. Le projet donne davantage de poids à l’enseignement de l’agroécologie grâce à l’apport de matière et du passage des paroles aux actes. L’évaluation se fait pendant les semaines thématiques, des CCF et de la pratique explicitée. 

https://adt.educagri.fr/actualites/dans-les-vignes-de-cosne-sur-loire-des-brebis-permettent-de-renouveler-pratiques-agricoles-et-pedagogiques 

Des jeunes s’engagent pour améliorer le climat scolaire

 

L’équipe éducative de Saint Joseph à la Réunion a identifié plusieurs raisons au mal être et difficultés des apprenants. Elle a monté un projet en partant du postulat que « si on est bien à l’école, on a envie de travailler et d’aller vers la réussite ».  

Après avoir suivi la formation sur la Médiation par les paires de Florac, l’infirmière et la CPE ont déployé des actions sur le climat scolaire, la cohésion entre classes et le vivre ensemble.  « Ça a été une révélation pour les adultes et les apprenants » nous dit Isabelle Boursier, enseignante socio-culturel qui bénéficie d’une décharge Tiers temps pour accompagner le projet. Le travail sur le bien-être relationnel a été développé en première et en terminale avec des élèves volontaires pour devenir médiateurs. Ils étaient accompagnés par une équipe d’adultes, eux aussi volontaires dans l’objectif d’apaiser le climat en classe. Des techniques de relaxation pour la concentration et la mémorisation ont été expérimentées avec une association agréée par l’Education nationale. 

 

Pour que des jeunes s’engagent dans le dispositif, plusieurs étapes sont mises en place. Grâce aux EIE (enseignement à l’initiative des établissements), tous les jeunes des classes entrantes sont sensibilisés et initiés aux notions d’empathie, de non-jugement, de communication non violente, de régulation des émotions. Ils découvrent aussi la médiation par des jeux de rôle sur des micro-conflits. A la fin de l’année, une grille d’évaluation est faite avec les élèves. Elle met en avant les compétences d’éventuels médiateurs sélectionnés par leurs paires pour l’année prochaine. Les jeunes choisis décident ou non d’intégrer une équipe de cinq médiateurs en 1ère. « Ça bouleverse notre posture d’enseignant. On leur accorde davantage d’attention et de la bienveillance éducative. Un nouveau relationnel se met en place avec davantage de confiance des jeunes envers les adultes. » 

 

May-Line et Pravin, médiateurs en terminale témoignent : « Avant la formation, les petites choses partaient facilement en conflit et il n’y avait pas d’entente dans la classe. La formation nous a permis de mieux nous comprendre, de mettre des mots sur nos émotions et de prendre de la maturité. On peut aider les personnes autour de nous s’ils ont un problème. On doit respecter certaines règles, dont la confidentialité qui en est un des piliers. Cette formation nous servira car en entreprise, nous travaillerons en équipe et il est important d’avoir une bonne entente. » Ils en retirent beaucoup d’estime personnelle et de compétences psycho-sociales relationnelles et cognitives. Ils s’observent, s’analysent et s’autoévaluent. Ils savent que certains comportements ne sont pas adaptés à toutes les situations. 

 

Cet engagement est valorisé dans leur diplôme par l’unité facultative « engagement citoyen ». Mais ajoute Isabelle Boursier : ce type de projet est long et doit avoir l’appui de la direction pour organiser l’heure hebdomadaire d’une année sur l’autre. « Il faut y croire, cela repose sur l’enthousiasme et de l’authenticité. La récompense est à la hauteur de l’investissement. » 

https://www.youtube.com/watch?v=_pAUusXsFqo 

 

Des jeunes à la découverte de l’interculturalité

L’EPLEFPA de Castelnau-le-Lez a développé un partenariat initié en 2019 avec le lycée agricole de Savalou au Bénin avec des échanges réciproques. Avec une baisse des mobilités due, entre-autres au contexte sanitaire, Serge Misericordia a comme objectif avec son tiers temps de relancer cette mission. 

La venue d’une délégation de lycéens de Savalou accompagnée de deux encadrants et le séjour de services civiques béninois sensibilisent les élèves de Castelnau-le-Lez à l’interculturalité. Des activités en commun leur donnent de nombreuses occasions d’échanger non seulement sur l’agroécologie mais aussi sur leur vie quotidienne, le monde, leurs études et leurs projets. Le service civique béninois est impliqué autant que possible dans la vie des classes. Il intervient auprès des écoresponsables et participe à des projets de classes avec des travaux pratiques et des visites. Tous ces moments partagés sont nécessaires pour lever les appréhensions quant au voyage et donner envie de s’engager. 

Le projet a pris une nouvelle dimension régionale sur l’agroécologie avec le consortium FaBéOc (Formation agroécologie au Bénin et en Occitanie) avec le lycée de la Riscle et des acteurs du territoire (enseignement supérieur, associations et collectivités). 

Le voyage au Bénin a été présenté aux différentes classes. Six élèves se sont portés volontaires pour l’aventure. La préparation du voyage a nécessité un vrai engagement des jeunes tous les mercredis après-midi. Ils ont dû travailler ensemble pour suivre l’évolution du projet. Sur place, ils ont travaillé avec les jeunes béninois et ont beaucoup échangé avec leurs hôtes. « C’est ce qui est attendu d’une mobilité internationale : la confrontation de mondes différents et donner envie d’apprendre. En réalité les jeunes des deux pays ont beaucoup d’aspirations communes sur leurs projets futurs. »  

Les jeunes développent l’estime de soi car avec au départ beaucoup d’appréhensions, ils ont fait quelque chose qu’ils ne pensaient peut-être pas pouvoir faire. Ça les a fait évoluer. Le rapport entre enseignants et jeunes change et un lien de confiance plus fort se développe. 

Au retour de cette mission, les jeunes valorisent leur expérience. Ils témoignent de leur aventure dans les classes pour, à leur tour, créer des envies. Ils présentent aussi leur voyage lors d’une soirée. Ils ont réalisé un film et des articles sont parus dans la presse. En sortant du lycée, ils peuvent valoriser cette expérience dans leur parcours d’étude ou de vie professionnelle.  

https://adt.educagri.fr/actualites/projetfabeoc-formationen-agroecologie-au-benin-et-en-occitanie 

Les projets dans lesquels s’engagent les jeunes doivent avant tout, avoir du sens pour eux. Ils reposent sur la confiance et l’écoute que les adultes leur portent. Ils leur permettent d’être acteurs d’actions concrètes dans les transitions, de prendre confiance en soi et de valoriser leur expérience. 

En étudiant ces témoignages et d’autres venus de l’enseignement agricole, de l’éducation populaire et de l’éducation nationale, les participants ont questionné en ateliers les conditions de réussite pour l’engagement des jeunes : https://adt.educagri.fr/animation-des-dispositifs/tiers-temps-et-chefs-de-projet-de-partenariat 

 

Mars 2023- Marie-Sylvie Auffret, Chargée de mission au CEZ-b Bergerie nationale