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De Rivesaltes à Théza, vers la reconception de l’exploitation agricole

L’établissement Agricampus 66 lance le projet de réhabilitation des 11 ha du site de Théza jouxtant le lycée pour y recréer un atelier de production de l’exploitation, autour d’un tiers-lieu nourricier. Visite guidée avec Adrien Fauvernier, tout nouveau chef de projet de partenariat missionné pour la mise en œuvre opérationnelle…

« Ici hier il n’a finalement plu que 1 mm, on n’est toujours pour l’instant qu’à moins de 50% de la pluviométrie normale annuelle* » : dès l’accueil, Adrien évoque un des enjeux majeurs du projet, la gestion quantitative de la ressource en eau dans un contexte de changement climatique et de conflits d’usage, particulièrement cruciaux ici. Paradoxe du site de Théza : situé en zone à risque inondable … et totalement irrigable grâce à la retenue voisine de Villeneuve de la Raho (au plus bas encore en cette fin octobre !). Ce qui ne décourage pas le jeune ingénieur, chargé pendant 3 ans de contribuer à la mise en œuvre de la réhabilitation des 11 ha de terres, plus ou moins en friches depuis une vingtaine d’année : « l’idée, c’est que l’on soit ici lieu d’innovation de démonstration, avec des productions plus résilientes », poursuit-il.

Un tiers-lieu au cœur du projet

Une des pièces maitresses du projet repose sur la création, à partir de l’ex- « Centre national de formation (horticole) », d’un tiers-lieu nourricier. « Sur ces 2 hectares, tout était en ruine, vandalisé, on en est à 240 m3 de déchets évacués ! On a débroussaillé, dépollué avec nos (peu de) moyens, et la région nous subventionne désormais pour garder et réhabiliter 3 000 m2 de serres », précise Sébastien Meunier, le directeur de l’établissement. Pour mener à bien cette action, la direction a missionné Antoine Rechke, formateur du CFPPA, à 50% de son temps. Ce dernier fourmille d’idées : un plateau technique, une station de compostage et un espace test maraichage AB en sol vivant (grâce au partenariat et au conventionnement déjà en place avec la station expérimentale Biophyto du CIVAM Bio 66 et du collectif Terradelviu), un Fab’LAB atelier paysan, un espace insertion (en lien avec l’école de la transition écologique voisine d’Alenya) et bien sûr des productions 100% bios, le lien aux formations et des expérimentations. « Par exemple, j’ai très envie de dédier une serre aux productions exotiques - ananas, curcuma, gingembre, mangues, … - avec un bassin pour garantir un taux d’humidité suffisant » précise malicieusement Antoine. Sans oublier l’accueil du grand public et de festivals, « comme nous l’avons déjà fait cet été, la dimension artistique et culturelle fait partie du projet » complète Sébastien.

Théza, des terres à reconquérir

Sur les parcelles alentour, le travail de reconception reste à imaginer, une fois que la phase de diagnostic sera terminée. Un sol limoneux-sableux, avec un taux de matière organique correct, mais des vestiges de vergers (abricotiers, oliviers) vieillissants, de rares haies, aucun plan de réseau d’eau à disposition, de nombreuses surfaces en jachère, un projet d’expérimentation d’agrumes avorté,… Adrien pose déjà un principe de base : « Je pense qu’il faut ici jouer la carte de la diversification, avec aussi de nouvelles espèces plus adaptées et résilientes, en lien avec bien sûr le site de production de Rivesaltes et la halle technique de transformation des produits dont on dispose ici à Théza »… en questionnant les besoins de main-d’œuvre nécessaire dans le temps. Premiers travaux engagés : l’arrachage des cannes de Provence envahissantes, pour permettre le lancement de plantations de haies dès que la sécurisation du site sera effective. « Ces haies seront plantées avec les apprenants, en partenariat avec Arbres et paysages 66, elles permettront le contrôle du vent, la lutte contre la dérive des pesticides utilisés par les agriculteurs conventionnels voisins et l’accueil d’une faune auxiliaire pour les cultures » précise Adrien.

Une articulation du projet avec le site de Rivesaltes

Ce projet doit bien sûr se mener en concertation étroite avec la reconception en réflexion des 30 ha du domaine de Rivesaltes, conduits en totalité en agriculture biologique par la directrice d’exploitation, Rafaela Urbina. Celle-ci évoque également la problématique majeure du changement climatique : « Même si on n’a pas trop de contraintes liées à la conduite en AB sur la vigne et les PPAM, on a sur l’abricotier des risques pathogènes (ECA, monilia) … sans compter le manque crucial d’eau cet été : l’Agly est encore à sec, l’arrêté préfectoral nous a contraint à diminuer les prélèvements sur notre forage et il n'y a eu plus d’eau du tout sur nos parcelles normalement irriguées via l’ASA (association syndicale autorisée) du canal de Rivesaltes ! On a ainsi récolté 11 tonnes d’abricots, peu rémunérés car de trop petits calibres, à l’instar de nombreuses exploitations arboricoles du département ». Rafaela évoque deux stratégies à mettre en œuvre :
. Renouveler le verger, en modifiant l’itinéraire technique sur l’abricotier : essais de mycorhization, apport de compost à la plantation, paillage, …
. Diversifier le verger (abricotiers, cerisiers, pêchers, …) avec des variétés rustiques à adapter à l’AB, en petites productions unitaires pour la vente directe au caveau. Ou encore l’expérimentation sur le pistachier (porté par le CFPPA) sur 50 ares, en lien avec le projet de filière lancé sur la vallée de l’Agly…

Ces projets ambitieux permettent enfin de fédérer tous les acteurs de l’établissement autour d’une vision commune. Au-delà de la participation à la création d’une SCIC pour mettre en place une plateforme locale d’approvisionnement des cantines, Agricampus 66 envisage aujourd’hui de répondre à l’appel à manifestation d’intérêt Compétences et métiers d‘avenir, en co-portage avec la chambre d’agriculture, pour donner encore plus de sens et d’articulation sur le territoire roussillonnais.

* Les précipitations moyennes annuelles sont de 620 mm/an à Perpignan … et seulement de 306 mm en 2022 et de 230 mm fin octobre 2023


Contacts :

Adrien Fauvernier, chef de projet de partenariat, adrien.fauvernier(at)educagri.fr

Rafaela Urbina, directrice de l’exploitation agricole (site de Rivesaltes), rafaela.urbina(at)educagri.fr

Antoine Rechke, formateur et chef de projet « tiers-lieux » (site de Théza), antoine.rechke(at)educagri.fr

Sébastien Meunier, directeur de l’EPLEFA Agricampus 66, sebastien.meunier(at)educagri.fr

Françoise Henry, chargée de mission ADT, DRAAF-SRFD Occitanie : francoise.henry01(at)agriculture.gouv.fr

Site web : https://agricampus66.fr


Lire aussi :

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Nov 2023 – Philippe Cousinié et Dominique Dalbin, animateurs Réso’them de l’enseignement agricole