Aller au contenu principal
Logo du ministère en charge de l'agriculture et de l'alimentation

Animation et développement
des territoires
de l'enseignement agricole

« Optimiser la consommation de l’eau en industrie agroalimentaire - nouveaux outils et utilisation pédagogique »

Dans un contexte de changement climatique qui entraîne des sécheresses de plus en plus fréquentes les disponibilités en eau commencent à devenir problématiques. En conséquence, les industries agroalimentaires, utilisatrices de quantités considérables risquent de devoir limiter leur consommation en adoptant des stratégies d’économie.

Pour répondre à ces enjeux, le RMT (Réseau Mixte Technologique) « Actia Écofluides » a été constitué pour une période de 5 ans (début 2020 à fin 2024) réunissant des partenaires institutionnels (Actalia, CRITT PACA, CTCPA, Institut français de la vigne et du vin, ITERG, AgroParisTech, ENIL Mamirolle).

Une formation s’est tenue du mardi 4 au jeudi 6 avril à l’ENIL (Ecole Nationale de l’Industrie Laitière) de Mamirolle dans le cadre du programme national de formation (PNF) porté par la bergerie nationale.

Son objectif était de diffuser les résultats du projet « Minim’eau » mené dans le cadre du RMT Ecofluides, en partenariat avec la société PROSIM.

Douze participants d’origines géographiques et de fonctions très diverses (enseignants, directeurs d’ateliers technologiques ou technicienne) étaient présents. Avec la collaboration du Centre Régional d’Innovation et de Transfert de Technologies (CRITT PACA), du Centre Technique de Conservation des Produits Agricoles (CTCPA) et de Reso'them, ils ont pu :

  • Questionner les pratiques et les usages de l’eau dans la transformation agroalimentaire
  • Faire le point sur les réglementations et recommandations sur l’eau et leur évolution
  • Découvrir la boite à outils « MINIMEAU » dont l’optimisation des consommations d’eau en industrie agroalimentaire est un des principaux objectifs
  • Envisager l’utilisation pédagogique de ces outils avec leurs apprenants

Questionner les pratiques et les usages de l’eau dans la transformation agroalimentaire

La problématique actuelle de diminution des ressources en eau potable due au changement climatique doit influencer les pratiques de l’usage de l’eau dans les IAA. Ainsi des économies considérables peuvent être effectuées uniquement en se conformant à un « guide de bonnes pratiques ». L’essentiel des consommations d’eau étant dû au nettoyage, c’est sur ce poste qu’il faut concentrer les efforts et l’adoption de gestes simples peut parfois s’avérer très efficace. Par exemple : privilégier le nettoyage des surfaces à la raclette plutôt qu’avec le jet d’eau est certes plus physique et potentiellement fatigant mais permet d’économiser des quantités considérables d’eau. L’exemple de l’atelier technologique de Mamirolle dans lequel un guide des bonnes pratiques a été élaboré et s’impose à tous les utilisateurs (salariés et apprenants) est exemplaire à cet égard.

Faire le point sur les réglementations et recommandations sur l’eau et leur évolution :

Les assises de l’eau ont abouti récemment à un objectif chiffré de réduction de l’utilisation de l’eau en IAA en facilitant l’utilisation d’eaux non conventionnelles (autres que potables) : Elles visent à en tripler leurs volumes d’ici 2025.

La législation doit donc évoluer sur ce point. En effet depuis le 7 janvier 2017 l’Article R 1322-14 du Code de la Santé publique prévoit l’utilisation d’eaux non conventionnelles mais seule l’eau de mer a été autorisée par décret jusqu’à maintenant et il reste donc à préciser quelles sont les réutilisations de l’eau autorisées. La démarche est enclenchée et pourrait aboutir prochainement. L’évolution est en marche : les Belges et les Italiens recyclent déjà l’eau. En France, le système est pour le moment verrouillé.

Toutefois, selon les recommandations de la FAO (Food and Agriculture Association) et de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) des expérimentations de réutilisation de l’eau sont en cours dans de nombreux secteurs d’activité et notamment dans l’agriculture et l’agroalimentaire.

Découvrir la boite à outils « MINIMEAU »

L’optimisation des consommations d’eau en industrie agroalimentaire est un de ses principaux objectifs. Pour cela une méthodologie a été élaborée utilisant divers concepts et outils :

L’empreinte eau :

C’est une méthode de calcul basée sur l’analyse de cycle de vie (ACV) permettant de faire état des consommations et des pollutions d’eau d’un système étudié (produit, service, organisation) et d’en évaluer les impacts environnementaux potentiels associés.

La quantité d’eau consommée tout au long de la conception d’un produit est ainsi calculée en faisant la différence entre la quantité d’eau prélevée et la quantité d’eau rejetée au cours du processus de production.

Et plusieurs facteurs de stress hydrique sont également intégrés dans un coefficient qui module la valeur quantitative pour tenir compte des impacts de la production sur l’environnement :

  • L’état local du stress hydrique.
  • La saisonnalité.

La méthode du pincement (pinch)

Développée au départ à partir des principes de la thermodynamique, la méthode du pincement a comme but de mettre en évidence des gains potentiels en énergie et en quelles quantités. Une adaptation de cette méthode à l’eau permet de repérer et quantifier des économies de consommation.

C’est une méthode graphique qui permet de visualiser les flux entrants (puits) et sortants (sources) caractérisés par leurs débits (m3/H) et leurs charges en polluants (kg /H) sous forme de courbes. La méthode consiste à décaler la courbe représentant les flux sortants de manière à ce qu’elle touche la courbe des flux entrants en un point appelé « pinch » (pincement).

 

Le diagramme de flux (flowsheet)

Ce schéma permet de représenter de manière synthétique les flux d’eaux au cours d’un processus de production en distinguant les différentes eaux utilisées et rejetées (eau du réseau, eaux de rinçage, eaux de lavage, sérum, …).

C’est une étape préliminaire à la collecte des données nécessaires pour pouvoir raisonner l’optimisation de l’utilisation de l’eau notamment en analysant le processus avec le logiciel « WaterOptim »

Envisager l’utilisation pédagogique de ces outils avec leurs apprenants

Des séquences pédagogiques ont été également conçues par les participants pour sensibiliser les apprenants à ces enjeux spécifiques notamment dans le cadre du BTSA rénové « BIOQUALIM » (Qualité, alimentation, innovation et maîtrise sanitaire).

Une visite des installations de transformation laitière de l’ENIL a permis de visualiser concrètement les dispositifs de contrôle et de supervision mis en place ainsi que leur valorisation pédagogique.

Les participants peuvent retrouver l’ensemble des documents et photos via un padlet.

Plusieurs capacités des modules du référentiel diplôme ont été choisies pour servir de cadres à l’utilisation des outils :

  • M 6 Garantie des performances de la ligne de production

                C6.3. : Contrôler les performances techniques de la ligne de production

  • M 7 Conduite d’une production agroalimentaire

                Capacité : 7.3 Optimiser l’activité de l’atelier

  • M 8 Politique qualité et stratégie RSE de l’entreprise agroalimentaire

                C8.1 - Analyser l’impact de l’activité de l’atelier de transformation sur son environnement

Dans un volume horaire de 18 heures se succèdent des activités pluridisciplinaires de sensibilisation puis d’exposé de la méthode de diagnostic suivie de sa mise en application dans le contexte de l’atelier technologique de l’établissement pour aboutir à une restitution écrite et orale en groupe qui peut donner lieu à une évaluation. Les enseignants de génie industriel et agroalimentaire, de maths, d’informatique et de gestion pourront être investis dans ces activités.

Les étudiants seront ainsi amenés à :

  • Formuler une problématique de l’eau à l’échelle locale,
  • Recenser les différents types d’eau issues d’un processus de production
  • Identifier les utilisations de l’eau sur la fabrication (arrivée vestiaire à la commercialisation du produit).
  • Prendre des mesures quantitatives et qualitatives de l’eau au cours d’un processus de production.
  • Formuler un diagnostic sur l’utilisation de l’eau et le présenter.

Voir la fiche de séquence pédadogique ici

 

L’évaluation des deux jours de formation fait apparaître un taux de satisfaction de 91 %. Les participants ont particulièrement apprécié la présentation des outils du RMT Minim’eau et l’illustration concrète de l’atelier de l’ENIL de Mamirolle. Ils auraient apprécié des rappels de connaissances de base sur la gestion de l’eau et les bonnes pratiques d’utilisation de l’eau. L’utilisation du logiciel WaterOptim leur semble pour le moment un peu trop complexe pour être proposée en situation pédagogique avec leurs apprenants. Mais, ils envisagent de réutiliser la technique du flowsheet avec leurs étudiants et de s’inspirer des séquences pédagogiques réalisées en groupe.

L’exemple de l’ENIL de Mamirolle

Jean-Louis Berner a eu l’opportunité de mettre en place un observatoire de l’eau dans les structures de transformation agroalimentaire grâce à une décharge horaire (dispositif tiers temps entre 2017 et 2020.

L’utilisation de l’eau fait l’objet de plusieurs séquences pédagogiques à l’ENIL de Mamirolle pour les formations BTSA STA, GEMEAU et ANABIOTEC.

Ainsi un travail en BTSA STA a permis de concevoir un jeu de rôle sur la gestion de l’eau à l’échelle d’un atelier où les acteurs sont confrontés à des situations à problèmes qu’ils doivent gérer grâce à des solutions techniques ou des bonnes pratiques. Le but du jeu est de trouver un consensus pour aboutir à une solution aux problèmes posés qui satisfassent l’ensemble des participants. Ce travail a été évalué en contrôle en cours de formation.

Jusqu’à l’été dernier, les étudiants étaient peu sensibilisés aux économies d’eau. Mais depuis 3 ans le Doubs ne coule plus en été sur une partie de son cours, et certaines communes sont en déficit pour la population et l’agroalimentaire. Dans ce contexte, l’accent est mis sur les bonnes pratiques de nettoyage sans gâcher (Proscription du nettoyage au jet au profit de l’utilisation de la raclette…)

Parallèlement un MIL (Module d’Initiative Locale) en BTSA GEMEAU sur la gestion de l’eau dans l’atelier a été conçu. Au cours de ce module les étudiants prélèvent des échantillons d’eaux en sortie d’ateliers sur une semaine une ou deux journées ils font les analyses de la DCO (Demande Chimique en oxygène), de N (l’azote) et du P (le phosphore) et le lien avec l’activité ramené au litre de lait. Cette démarche a permis de mettre en évidence des résultats surprenants. Ainsi les journées où la charge des rejets est la plus importante ne correspond pas forcément aux journées de plus grande production, ce qui nécessite une analyse plus fine des rejets selon l’activité des ateliers.

Les BTSA GEMEAU , qui connaissent à la fois l’amont et l’aval de l’utilisation de l’eau et son traitement, participent aux analyses et échangent des données au niveau de la NEP et ont mis en évidence le problème des rejets en phosphore et la difficulté de la station d’épuration à les traiter.

  • Actalia, centre technique agroalimentaire, propose des expertises autour de 6 pôles de compétence, avec une spécialisation forte dans le secteur du lait et de la sécurité des aliments.
  • Institut français de la vigne et du vin est un organisme technique qui « a pour mission d’intérêt général de conduire des études de portée générale pour l’ensemble de la filière viti-vinicole, dans les domaines de la sélection végétale, de la viticulture, de la vinification et de la mise en marché des produits »
  • ITERG L'Institut des Corps Gras et produits apparentés propose des infrastructures de recherche, de production, d'analyse et d'expertise pour contribuer à renforcer l'innovation et le transfert
  • AgroParisTech l'institut des sciences et industries du vivant et de l'environnement,

INRAE institut de recherche public œuvrant pour un développement cohérent et durable de l'agriculture, l'alimentation et l'environnement

  • PROSIM (PROCESS SIMULATION) propose des logiciels de simulation de procédés et des prestations de service qui permettent aux industries d’améliorer leur efficacité opérationnelle, de réduire leur empreinte carbone, de devenir plus économes en énergie et de tirer le meilleur parti des ressources disponibles.

Contacts intervenants :

Yvan Deloche, expert environnement chez CRITT Agroalimentaire SUD

yvan.deloche(at)critt-iaa-paca.com

Marie-Pierre LABAU Directrice pôle sud ouest CTCPA

mplabau(at)ctcpa.org

Juillet 2023 – Jean-Armand Viel, CEZ-Bergerie nationale ; Irène Allais et Dominique Dalbin, animateurs Réso’them de l’enseignement agricole