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Deux projets de reconception agroécologique en zéro phyto à Saint-Paul et à Saint-Benoît

A Saint-Paul, le succès de la parcelle de démonstration STOP, comme exemple de transition agroécologique en zéro phyto, se confirme après la mise en place d’un poulailler mobile. L’expérimentation se poursuivra pour démontrer la viabilité économique de ce système. Pour servir de support de démonstration à l’échelle de l’océan Indien, une parcelle « d’agroécologie stratifiée en zéro pesticide » (AZOP) basée sur la syntropie a été mise en place à Saint-Benoît, dans l’Est de l’île.

Saint-Paul : un site dédié aux fruits et légumes et engagé dans la réduction phytosanitaire

Créé en 1989, le site de Saint-Paul est à l’origine de l’EPLEFPA Forma’Terra. Le site est organisé avec des petits vergers (manguiers, bananiers, palmistes et associations avec le maraîchage). La pitaya (fruit du dragon) a été introduite en 2009 sur 1,5 ha. Saint-Paul, première exploitation de l’île à avoir cultivée ce fruit, sert de référence technico-économique. Afin de développer la biodiversité de la parcelle, dès 2017, des haies indigènes ont été plantées à partir de quarante espèces locales autour du verger avec notamment l’appui du bac pro GMNF et du BTSA GPN. « La conversion en AB a démarré en 2015 et a progressé avec 40 % de la SAU des trois sites, l’ensemble des surfaces étant également HVE. » précise le directeur d’exploitation Josian Delaunay. L’engagement dans le plan Ecophyto a démarré avec l’action 16 dès 2010. Elle s’est poursuivie avec le projet DEPHY EXPE RESCAM (2013-2018) et enfin le projet DEPHY EXPE STOP (2018-2023), les deux derniers projets étant sur les fruits et légumes. Plus récemment, la parcelle a servi de support au projet Ecophyto’Ter entre 2019 et 2024. « La parcelle STOP en zéro phyto a été coconçue avec la profession sur 0,48 ha avec des lignes de fruitiers : avocatiers, figuiers, grenadiers et corossoliers. Nous avons décidé de la pérenniser car six ans, c’est trop court. Efficiente depuis 2021 sur le plan technique, nous voulons maintenant démonter son intérêt économique. » indique Josian.

La valorisation des productions à FORMA’TERRA

La production agricole de Forma’Terra est valorisée dans six circuits de vente. La canne à sucre, produite à Piton Saint-Leu, est vendue à Tereos. Les mangues (30 Tonnes) sont commercialisées par l’association des vergers de l’Ouest (AVO). Trois communes : Saint-Paul, Le Port et Trois bassins achètent pour leur restauration scolaire. Trois « basardiers » locaux, ou marchands de primeurs, achètent une petite partie de la production. Depuis janvier 2024, un point de vente directe a été installé avec la contribution d’une volontaire du service civique (VSC). Il approvisionne la communauté de Forma’Terra et la DAAF de la Réunion sur commande. Prochainement le format AMAP sera mis en place. Jusqu’en 2023, Forma’Terra était associé à une coopérative en AB qui a fermé. « En effet, dès 2022, on a observé des difficultés sur le marché du bio et en 2023, nous avons eu une chute des ventes de 40.000 € liée à cette crise et aux effets du cyclone sur la production. » révèle Josian. C’est donc vers la vente directe que s’oriente l’exploitation agricole. « Nos œufs à la ferme sont vendus en AB à 0,5 € par œuf contre 0,7 à 0,8 € en grandes surfaces. Notre prix de vente a dû être relevé de 0,15 € du fait du coût de l’alimentation. » conclue Josian.

Le projet d’écopâturage en poulailler mobile nommé localement « Roulapoul »

Le projet d’écopâturage a été conçu avec la licence professionnelle ADD (Agronomie Développement Durable en milieu tropical insulaire) en projet tutoré et le BP REA. Le poulailler mobile, « Roulapoul », est un projet financé par l’ADEME. Il a démarré en juin 2023. Il permet, avec 60 poules pondeuses, de travailler sur des rotations avec l’objectif de réduire les réserves de semences d’adventices et de limiter les larves de mouches des fruits au sol. « Les aubergines et les fruits de la passion tolèrent la présence des poules durant le cycle cultural. L’efficacité du passage des poules sur une parcelle en fin de culture est perceptible. Un gain de 3 à 4 semaines avant la levée des adventices permet de démarrer une culture sans concurrence. Les poules suivent les rotations de culture pour assurer la pleine efficacité de l’écopâturage. » précise Josian. Le travail de désherbage reste prioritaire car la parcelle STOP absorbe 0,8 d’ETP par an et par ha pour le désherbage manuel.

Un autre projet d’écopâturage est prévu sous le verger de manguiers avec l’introduction de deux bœufs Moka. Une réflexion est également en cours pour développer l’alimentation des poules à partir des produits de la ferme. 

Perspectives de la parcelle STOP

L’ensemble des résultats de la parcelle STOP a été diffusé dans un rapport du DEPHY EXPE. La parcelle STOP a donné des performances environnementales remarquables avec une diversification végétale croissante (de 16 espèces en 2020 à 44 en 2023 comme l’indique le tableau ci-après) ; des IFT de biocontrôle faibles et une croissance observée des auxiliaires de culture. Les résultats sociaux sont soutenables. L’évaluation économique reste incomplète car on ne dispose que de trois années de résultats. Il est donc indispensable de poursuivre l’expérimentation STOP pour démontrer sa viabilité économique. L’évaluation du poulailler mobile sur un temps plus long viendra compléter les perspectives du système STOP à La Réunion. La grande sensibilité de certaines espèces aux bioagresseurs (tomate et courges) oriente les cultures vers les légumes racines (taro, manioc, patate douce), les aromates (basilic, persil, coriandre, thym et menthe), les légumes feuilles (salades, brèdes), les aubergines résistantes, les fruits de la passion et le corossol. Un travail de réflexion est en cours pour adapter le plus possible le verger aux cyclones récurrents qui dévastent manguiers, avocatiers et grenadiers.

Le choix de Saint-Benoît dans l’Est de l’île pour l’agroécologie régionale

Les travaux sur Ecophyto à l’île de La Réunion ont été réalisés en totalité dans l’Ouest de l’île. Donc il n’y avait pas d’expérimentations Ecophyto dans la partie Est, la plus arrosée de l’île. Dans ce contexte, il a été décidé de prolonger les travaux de la parcelle STOP sur une autre parcelle située à Saint-Benoît, dans l’Est. Le projet « Agroécologie stratifiée en zéro pesticide » (ASOP) est donc né avec une stratégie de reconception totale sans irrigation et en s’appuyant sur les biosolutions (biocontrôle, biostimulants, préparations naturelles peu préoccupantes…) comme définies par le RMT BESTIM. Le plan de la parcelle comprend des lignes d’arbres fruitiers et l’implantation de tubercules (patates douces) avec l’implantations de haies en bordure et une amélioration du sol. « Où est le curseur en agroécologie ? C’est devenu un mot valise.  Nous, on se place assez haut et pointu dans la stratégie de reconception. » Affirme Jérôme Masson, en charge du projet. La parcelle ASOP servira de lieu de démonstration régional avec Mayotte où sont proposées d’autres expérimentations chez deux agriculteurs.

 

ASOP Océan Indien, une parcelle de démonstration à dimension internationale

Le projet ASOP fait partie d’une réflexion agroécologique avec l’association « Le vélo vert » située à l’île Maurice et Madagascar pour ses travaux en compost fermenté. Elle aura donc un usage pour tous les pays de l’océan indien et au-delà. La démarche s’appuie sur les savoirs ancestraux ou les pratiques paysannes traditionnelles.  Sa finalité est de créer des agroécosystèmes robustes et résilients. ASOP signifie agroécologie stratifiée zéro pesticide sur les principes de l’agriculture syntropique (agroforesterie successionnelle).


De quoi êtes-vous fiers ?

  • Sophie : « Nous avons pu montrer aux élèves qu’on pouvait faire différemment. Nous avons fait la preuve que d’autres voies étaient possibles et que l’on pouvait les essayer. »
  • Josian : « Nous avons pu répondre au défi de réduction des produits phytosanitaires par la recherche, l’observation empirique, l’expérimentation et les pratiques en lien avec les apprenants. »
  • Jérôme : « L’agroécologie s’appuie sur une assise très large : biodiversité, alimentation, circuits courts, préservation des biens communs : eau, air, sol. Nous apportons des réponses à ces enjeux avec de solides bases scientifiques et techniques. »


Ressources :



Exploitation agricole

  • SAU site Saint-Paul : 10 ha
  • Productions de Saint-Paul : mangues HVE 6,22 ha, pitayas AB 1,5 ha, bananes AB 0,85 ha, maraîchage AB 0,4 ha, verger maraîcher AB 0,5 ha, mangues AB 0,28 ha, palmiste AB 0,1 ha, 39 ruches (miel HVE) et 60 poules pondeuses.
  • SAU site de Saint-Benoît 3 ha
  • Productions de Saint-Benoît : letchis AB 1 ha, maraichage AB 1,35 ha, vanille AB 0,25 ha et location ACI AB 0,4 ha.
  • SAU de Piton Saint-Leu : 6 ha
  • Productions de Piton Saint-Leu : Canne à sucre HVE 3,5 ha et 0,5 en expérimentation, prairie 1 ha et location ACI en AB 1 ha.
  • Nombre d’ETP (Hors DEA) : 3,5 ETP et deux apprentis.


Contacts utiles :


Juillet 2024 – Philippe Cousinié, animateur Réso'them de l'enseignement agricole avec la contribution de Josian Delaunay, Jérôme Masson et Sophie Leroy de La Brière de l’EPLEFPA Forma’Terra et l’aimable autorisation de l’EPLEFPA pour l’iconographie et les photos.