Juillet 2022- Cédric Boussouf et Dominique Dalbin, animateurs Réso’them de l’enseignement agricole
Romans : du végétal local pour mieux s’adapter à l’environnement
Fin d’année scolaire : malgré les fortes chaleurs estivales sous les serres, Olivier Roudil le directeur de l’exploitation horticole du lycée et Caroline Baconnier, chargée d’expérimentation, suivent la pousse de plants d’églantiers, de troènes, de cystes, de sauges « locaux » … Certains ont même été mis en production par des étudiants en BTS Production horticole eux-mêmes, comme ces fusains en godets semés par le jeune Willy il y a quelques semaines. L’établissement est engagé en effet depuis 2019 dans le projet « RéCoLTANT» (soutenu par le dispositif CASDAR TAE+), pour s’inscrire dans la démarche et à terme adhérer à la marque « Végétal local ». En effet, les végétaux sauvages et locaux (prélevés durablement dans la région biogéographique) ont bénéficié d’une longue co-évolution avec la faune et la flore locales : ils contribuent ainsi au bon fonctionnement des écosystèmes auxquels ils sont inféodés. Leur utilisation en plantation, réhabilitation ou végétalisation est bénéfique pour la résilience des écosystèmes. « Il n’y a pour le moment que 75 producteurs adhérents au niveau national, mais cela augmente vite » précise Olivier Roudil, qui rajoute : « après l’envoi du dossier et l’audit pour le respect du référentiel technique, nous pensons avoir la marque en 2023 ».
Une démarche … expérimentale
Tout a commencé en effet avec l’appropriation de ce référentiel technique par les équipes et la sensibilisation des apprenants sur les trois établissements horticoles partenaires du projet : Romans pour la zone méditerranéenne, St Ismier pour la zone Alpes et Dardilly pour le bassin Rhône-Saône et Jura. « Nous avons proposé trois fois la même formation pour intégrer les classes des trois lycées, avec nos partenaires Missions haies Auvergne (pour les ligneux) et le Conservatoire botanique nord alpin (pour les herbacées) » explique Caroline Baconnier, « Mais nous nous sommes formés en même temps que nos apprenants ! », rajoute malicieusement Olivier.
Il est vrai que les protocoles sont rigoureux : pour la récolte des graines de ligneux par exemple, on doit prélever sur au moins 30 individus dans le milieu naturel (à plus de 500 m d’une habitation) exempt de plantation d’arbres après 1970. « Malgré les contraintes liées au covid, les étudiants ont pu collecter en autonomie près de chez eux pour avoir suffisamment de graines. On a la chance d’avoir des étudiants très intéressés et très curieux » constate Olivier. Mais peut-être que la démarche expérimentale renforce la motivation…
La phase de stratification des graines (imitation de la nature pour lever la dormance) peut s’avérer complexe à réussir : « il existe un guide technique pour les principales espèces ligneuses mais il faut souvent faire de la recherche bibliographique » précise Caroline. Selon les espèces, dans un mélange terreau-sable humide pendant plusieurs mois au frigo … ou même en brûlant les graines, comme pour le cyste (« Mais pas n’importe comment ! » rajoute Olivier).
À la germination des semis, on passe les plants en godets voire en pleine terre. Ces plants sont destinés d’une part aux particuliers et d’autre part aux acteurs du territoire (Ligue pour la protection des oiseaux, chasseurs, collectivités,…) pour la plantation de haies.
Projet fédérateur
« Ce projet nous a aussi permis de nous diversifier et de redynamiser l’activité de la pépinière » fait remarquer Olivier, qui poursuit : « c’est aussi un plus pour notre projet de création d’un magasin avec 14 producteurs (dont deux autres horticulteurs), avec une salle de classe attenante pour impliquer activement notre filière vente (bac pro TCVUJ) ». Caroline rajoute : « on a aussi présenté la marque aux formations adultes du secteur aménagement au CFPPA. Nous avons fait une première formation de trois jours, avec l’exploitation en support et nous avons un projet d’UCARE pour le BP Responsable de productions ».
L’implication active des apprenants s’est également concrétisée par l’animation d’ateliers lors de la Journée technique « D’haies demain » que le lycée a proposé aux acteurs du territoire le 25 novembre dernier : de la production de jeunes plants en passant par la plantation de haies jusqu’à l’aménagement favorisant la biodiversité faunistique (voir la vidéo du stand sur la stratification des graines). Cet évènement fédérateur sera certainement programmé régulièrement dans les prochaines années.
Fabien Chalumeau, directeur de l’établissement, évoque aussi l’articulation avec le projet Archipel des plantes gourmandes, porté par le CFPPA, pour l’inventaire et la valorisation des plantes anciennes et locales cultivées : « L’idée est d’implanter un petit conservatoire sur notre domaine. De plus on peut articuler avec notre projet d’agroforesterie… et en lien avec le Projet alimentaire territorial ». Pas de doute, ici à Romans on travaille en cohérence et avec conscience des enjeux environnementaux…
Voir aussi :
- Portrait vidéo d'Olivier Roudil, DEA de l'exploitation horticole
- Article sur la journée de formation à la récolte de graines de ligneux (oct 2020)
- Article et vidéo interview (le lien horticole, nov 2021)
- Guide Enseigner les transitions avec les végétaux génétiquement locaux (Bergerie nationale, 2021)
Contacts :
Olivier Roudil, directeur de l’exploitation : olivier.roudil(at)educagri.fr / voir son portrait vidéo
Caroline Baconnier, chargée d’expérimentation : caroline.baconnier(at)educagri.fr
Guilhem Heranney, enseignant : guilhem.heranney(at)educagri.fr
Fabien Chalumeau, directeur de l’EPLEFPA Terre d’horizon Romans-sur-Isère : fabien.chalumeau(at)educagri.fr