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Quels vergers pour une production de fruits durables ? Des vergers innovants à très bas intrants

C’est sous un timide soleil qu’a démarré la visite du site INRAe de Gotheron, aux abords de la petite ville de Saint-Marcel-lès-Valence (26) ...

Environ une quinzaine de membres du groupe ResAB Arboriculture participaient à cette journée : les EPL de Belleville en Beaujolais et l’EPL de Carpentras, notamment venu avec une classe de BTS ACSE 2 et la licence pro ABCD.

Le site héberge en plus de l’INRAe d’autres institutions, comme l’ACTA, le GRAB (Groupement de Recherche en Agriculture Biologique) ou encore l’ITAB. Près de 86 ha permettent d’accueillir les différentes expérimentations, majoritairement en agriculture biologique, dont une quinzaine d’hectares sont en forêts, et les haies comptent pour 8 km linéaires.

Pour démarrer la matinée, Laurent Brun, chercheur spécialisé dans l’abricotier, et Stéphanie Drusch, chercheuse spécialisée dans le pêcher, nous ont présenté leurs dernières expérimentations.

Les travaux sur l’abricotier consistent majoritairement à trouver des solutions aux bio-agressions les plus prégnantes. L’enjeu est important, notamment pour la filière biologique, car il devient de plus en plus difficile pour les producteurs d’avoir des rendements stables et pérennes, et le risque est de ne plus avoir aucun producteur biologique d’abricots à terme.

Le chercheur a expliqué que les principales problématiques rencontrées étaient la bactériose, la moniliose et l’EC (enroulement chlorotique) induit par le psylle porteur de la bactérie.

Une des solutions testées et qui semble être concluante consiste à greffer le fruitier en hauteur, comme le montre la photo ci-contre. L’intérêt de greffer plus haut que d’habitude permet d’être moins touché par les bactéries Pseudomonas (plusieurs espèces entrent en jeu), qui sont notamment présentes dans le sol, et ont donc plus de mal à atteindre les jeunes plants ainsi greffés. Cependant, jouer sur la hauteur de greffage réduit le rendement, et la densité initiale de 500 arbres/ha a été doublée pour contrer cet effet. Les résultats montrent que le rendement ne baisse pas, voire augmente. Une piste prometteuse.

 

 

Contre le psylle, afin d’éviter ou de limiter l’apparition de l’EC, un essai sous filets a été mis en place, comme le montre la photo ci-dessous.

Parmi les inconvénients des barrières physiques, celles-ci marchent dans les deux sens. Aussi, une nouvelle problématique a émergé : des pucerons sont rentrés sous le filet, mais n’ont pas subi de prédation grâce à ce même filet. Il s’agit donc d’être vigilant lors de la mise en place de cette protection.

Enfin, la dernière expérimentation, qui a interrogé les participants, teste des poules sous abricotiers. L’entretien des parcelles par les animaux semble prometteur, d’autant plus que d’autres essais avec des lapins de chair ont également été menés (projet Lapoesie – programme Métabio). Toujours en cours, les premiers résultats semblent prometteurs quant à l’impact positif des poules sur la prolifération des insectes ravageurs, ainsi que sur la fertilisation

Les travaux sur le pêcher qui ont été présentés tournent principalement autour des couverts végétaux, dont les attentes sont actuellement très fortes en agriculture. Les différents couverts sont testés en interrangs et sur le rang.

Différentes modalités ont été mises en place, en pure ou en méteil, comme avec le mélilot, une légumineuse, qui n’avait pas bien démarré sur le rang lors de notre passage. L’objectif avec cette plante est de repousser les mulots.

En revanche, le méteil semé en interrang était plutôt bien parti. Le but du méteil est de le laisser pousser jusqu’à une certaine taille, le faucher puis mettre le mélange sur le rang en paillage.

 

 

D’autres plantes sont expérimentées sur le rang : de l’achillée millefeuille pour son pouvoir allélopathique ou du thym pour repousser les ravageurs.

Affaire à suivre…

L’après-midi a été consacré au système le plus novateur du site : le verger circulaire. Sylvaine Simon, chercheuse à la tête du « Projet Z », pour zéro pesticide, a expliqué l’origine et la volonté de co-construire un verger circulaire.

Le projet part d’un constat : En verger classique, malgré de très gros efforts pour réduire les produits phytosanitaires, aussi bien chimiques que naturels, la diminution touche un plafond autour de 50%. Ce modèle a été remis en question, et un ensemble d’acteurs (agriculteurs, conseillers, experts, chercheurs) a donc réfléchi à des propositions de vergers novateurs.

L’objectif principal est de réussir à produire sans aucun produit phytosanitaire, en ne se basant que sur les services écosystémiques, au regard de toutes les connaissances végétales actuelles. Dans la durée, le projet ne s’interdit pas d’utiliser des solutions de biocontrôle, mais aucun produit chimique de synthèse.

Le verger a donc été conçu en 2016 et planté en 2018. Comme la chercheuse le précise bien, les espèces, variétés mais aussi la conformation spatiale ont été pris en compte : « le choix du cercle se base comme étant la forme avec la surface de contact la plus petite aux bioagresseurs ; par ailleurs, avoir la mare au milieu, c’est pour obliger les animaux qui veulent s’abreuver à prédater sur le chemin. » explique Sylvaine Simon.

Le verger reste toutefois mécanisable, ce qui est d’ailleurs pratiqué lors des différentes interventions.

Concernant la disposition des différentes essences implantées, celle-ci est en cercle concentrique jusqu’à la mare. Le cercle extérieur comprend une haie sylvestre, avec un mélange d’arbres de hauts jets et d’arbres plus petits, afin de créer une barrière physique contre le vent et les bioagresseurs. En outre, des essences mellifères et florifères ont été installées pour apporter toute l’année de quoi nourrir la biodiversité présente. Comme le dit très bien la chercheuse, le but est d’offrir le gîte et le couvert pour garder sur site les potentiels auxiliaires.

 

Désormais, rendez-vous dans 3 – 4 ans pour connaître les performances de ce système au fur et à mesure des années !

 

Avril 2023 - Julien Leroy, Chargé de mission au CEZ-Bergerie nationale de Rambouillet et Hervé Longy, animateur Réso’them de l’enseignement Agricole