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Animation et développement
des territoires
de l'enseignement agricole

Campus Terres de l'Aube (Troyes) : des ateliers pour lutter contre le dérèglement climatique et réfléchir aux actions individuelles et collectives

Le Campus Terres de l’Aube a organisé une série d'ateliers pour sensibiliser les élèves de cinq classes à la lutte contre le dérèglement climatique du 20 au 22 mars 2023. Retour sur ces journées inscrites dans un module « Santé et développement durable ».

« Dans un environnement qui change, il n’y a pas de plus grand risque que de rester immobile ». La citation est de Jacques Chirac, elle a été reprise par Manon et Laureen (élèves en seconde productions agricole et SAPAT) afin de faire le bilan des journées d’éducation au développement durable. « Être dans l’action, s’engager pour le climat… la mobilisation des jeunes est importante. Les informer, les former par le biais du lycée est essentiel » introduit Elodie Brébant, enseignante en biologie-écologie et l’une des coordinatrices de ce module sur deux jours et demi, qui avait aussi pour principe de rendre les jeunes actifs. « On voulait faire un temps fort commun à plusieurs classes, montrer aux élèves que l’établissement se préoccupe du climat et qu’ils font partie de la solution » explique-t-elle.

Les journées de sensibilisation à la lutte contre le dérèglement climatique ont démarré par un photolangage, permettant aux participants de s'immerger dans la réalité des enjeux environnementaux et de partager leur vision de la situation actuelle. Cette technique d’animation permet de favoriser les échanges, d'exprimer les préoccupations de chacun et d’écouter une diversité de points de vue. « Cela a aussi révélé les inquiétudes des jeunes et une certaine conscience de la gravité de la situation » ajoute Elodie.

Puis, Météo France est intervenu en plénière pour dresser un constat sur l'état des connaissances en matière de climat actuel et futur en ex-région Champagne-Ardenne et montrer que tout le monde est concerné. Cette matinée a marqué le début d'un programme d'ateliers pour sensibiliser les élèves à la nécessité d'agir contre le dérèglement climatique. « L’idée était aussi de proposer un cadre propice à la compréhension des problèmes, au dépassement des idées reçues, à la réflexion commune sur les solutions et les engagements possibles dans leur vie citoyenne et de futur professionnel. Acteurs tout au long de cette démarche, les élèves s’approprient les concepts et ont plus de chance de s’y impliquer pleinement. », complète Pascaline Nobiron, enseignante en biologie-écologie, également impliquée dans la préparation.

Ces ateliers ont rassemblé des intervenants de différents domaines (conseiller de chambre d'agriculture, animateurs d'associations, scientifiques, agriculteurs, autres enseignants) pour partager leurs connaissances et leurs expériences sur les actions à mettre en place à l'échelle individuelle et collective. Les classes suivaient presque tous les ateliers sur les deux premiers jours mais dans un ordre différent.

La Fresque du Climat et MyCO2 pour comprendre les grands enjeux et initier une réflexion sur les modes de vie

Le premier atelier a porté sur la réduction de l’empreinte carbone individuelle avec l’animation MyCO2 qui donne aussi des repères sur les ordres de grandeur des postes les plus émetteurs (transport, logement, alimentation…). Grâce à cette animation interactive et ludique, les élèves ont identifié de manière concrète et pratique comment réduire leur impact. L’intervenant, Yvan Reynaud, est un enseignant d’éducation socio-culturelle de l’établissement de Chaumont, associé au RMT ClimA et intéressé par les travaux du Think Tank The Shift Project. « La pire des choses aurait été que les élèves ne réagissent pas. Je préfère que cela génère de la colère. Cela veut dire que le message est passé (le monde d'aujourd'hui ne sera pas celui de demain). Notre façon de parler du réchauffement climatique est un point très important. » relève Yvan au sujet de la réaction des élèves. « Mais qu’ils sachent faire la différence entre les faits et les opinions reste un point à améliorer » d’après lui. Il suggère également qu’un même travail (« je calcule mon empreinte carbone ») pourrait être effectué avec les personnels de l’établissement. Même si ce n’est pas facile à organiser, le fait que les adultes ne se mêlent pas avec les apprenants dans ce genre d’exercice, limite, de son point de vue, la portée du message (= il faut faire quelque chose contre le dérèglement climatique). « C’est une question de cohérence. En effet, les élèves se demandent sans forcément l’exprimer « ...et vous, qu’est-ce que vous faites pour limiter le réchauffement climatique… ? »)» souligne-t-il.

Lors du deuxième atelier, les élèves ont participé à la fresque du climat. C’est un outil pédagogique participatif qui permet de mieux comprendre les enjeux du changement climatique, leur ampleur et leur complexité, ses causes et ses conséquences, par une approche collective. Cette animation permet d’identifier les leviers d’actions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour conclure l’atelier, l’animateur issu d’une association, a demandé aux élèves de proposer des solutions individuelles ou collectives afin de lutter contre le dérèglement climatique tout en évaluant leur mise en œuvre : de « facile » à « difficile ». Les jeunes ont choisi 2 ou 3 engagements à suivre jusqu’à la fin de l’année scolaire. « Une des difficultés est qu’ils manquent souvent de notions scientifiques, de vocabulaire et l’animateur doit s’adapter, revenir sur certains points » précise Elodie Brébant. « Il faut aussi être vigilant sur la posture d’animateur et ne pas tenter de leur imposer des engagements qu’ils ne sont pas encore prêts à prendre, même si on aimerait parfois que le passage aux actions prioritaires soit plus rapide » souligne-t-elle.

Les classes participaient à l’une ou l’autre de ces 2 animations sur une demi-journée, avant de tourner sur des ateliers plus courts de deux heures.

D’autres ateliers pour zoomer sur les problèmes et leviers concernant le commerce, la gestion concertée de l’eau ou des villes, la reforestation

Le troisième atelier a traité des choix de consommation pour lutter contre le dérèglement climatique. L'animation "Changeons le commerce, pas le climat !" est une action de sensibilisation proposée par Artisans du Monde, une organisation de commerce équitable. Cette animation vise à expliquer les liens entre le commerce mondial, le changement climatique et les inégalités sociales ; elle montre comment le commerce équitable peut contribuer à la lutte contre le changement climatique. L'animation propose des exemples concrets de producteurs qui adoptent des pratiques agro-écologiques, en préservant la biodiversité et en limitant leur empreinte carbone. Les participants sont également invités à réfléchir aux évolutions de consommation. « On cherche à leur faire prendre conscience qu’ils ont tous un rôle à jouer en devenant des consom’acteurs » précise Pascaline Nobiron.

Le quatrième atelier a abordé les enjeux de la ressource en eau en lien avec le dérèglement climatique de manière locale et à l’échelle du paysage avec Mme Aurélie Prestat, chargée de mission Développement local à la Chambre d’agriculture de l’Aube. En utilisant la mallette Ricochets, les jeunes construisent un paysage évolutif sous forme de maquette, jouent divers rôles (maire, pêcheur, technicien…), peuvent comprendre la complexité d’une gestion partagée et appréhender les conflits d’usage liés à l’eau. Ils sont également encouragés à réfléchir aux solutions pour protéger la ressource (en quantité et en qualité). « Cela fait du lien avec la préservation d’une ressource commune qu’ils doivent étudier dans le programme du bac professionnel » ajoute Elodie. « Je me sens concerné par le sujet de la sécheresse qui touche de plus en plus souvent les parcelles de mes parents ! » souligne Maxence (élève en 1eSTAV).

Durant le cinquième atelier, les élèves ont mobilisé le jeu de société coopératif TIC-TAC Climat (de Bioviva). « On s’est amusé tout en apprenant sur le thème du changement climatique » commente Gladys (élève en 1eSTAV). En choisissant des actions individuelles ou collectives à mettre en place pour limiter leurs émissions de CO2, ils prennent conscience de leurs conséquences à l’échelle mondiale sur les Hommes et dans les territoires. Ce jeu coopératif implique d’expliciter ses arguments dans l’équipe. Les élèves sont donc amenés à travailler ensemble pour trouver des solutions aux défis proposés, appréhender les enjeux économiques, sociaux et environnementaux pour sauver diverses villes sur une carte. « Apprendre sous forme de jeu, cela nous permet d’être plus attentif » note Chaïna (élève en 1eSAPAT).

Enfin, le sixième et dernier atelier a encouragé la créativité et l’expression artistique (via la création d’arbres en papier, encadrée par les enseignants d’éducation socio-culturelle) afin de sensibiliser les élèves à l’importance de la reforestation et de l’agroforesterie pour lutter contre le changement climatique.

Un film et une table ronde pour ouvrir sur l’agriculture porteuse de solutions pour le climat avec l’exemple de la restauration des sols

Ces journées se sont clôturées par un temps fort, le troisième matin, qui s'inscrit dans le "Printemps des transitions, Les pieds dans l'amphi", porté par le ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.

Les élèves, étudiants et apprentis des filières agricoles ont suivi une projection-débat autour du film "Kiss the ground : Mission régénération" qui replace le sol au cœur de multiples enjeux (souveraineté alimentaire, séquestration de carbone, restauration de la biodiversité…). Des professionnels ont enrichi les échanges lors du débat avec les jeunes sur les pratiques de conservation des sols, avec des exemples de couverts végétaux qu’ils testent, de la diversification végétale réintroduite, leurs choix, doutes et réussites. « Comment peut-on s’en sortir avec les pertes économiques liées aux baisses de rendements dus à ces pratiques agricoles ? » a demandé Lubin, élève de terminale STAV. « Aujourd’hui, mes rendements sont assez proches de ceux des autres et mes coûts de production ne sont pas supérieurs. Cependant, lorsque l’été est sec, comme en 2022, je m’en sors mieux car mon sol, plus riche en matière organique et plus couvert, retient mieux l’eau », répond l’un des agriculteurs.  Tous les intervenants ont partagé l’idée que ces pratiques, plus respectueuses du sol et de la vie qu’il héberge, nécessitent des connaissances actualisées et donc que la formation et les échanges de pratiques entre les agriculteurs sont indispensables. « J’ai bien aimé le film, facile à comprendre et intéressant et l’échange avec les agriculteurs qui répondent à nos questions avec énormément de pertinence » Ilona (élève en 1e CGEA).

D’autres élèves des filières services à la personne ont, quant à eux, participé plutôt à un atelier présenté par le CIEOA (Centre d’Initiation à l’Environnement d’Othe et d’Armance) sur le lombricompostage. C’est une pratique qui pourrait trouver sa place en maison de retraite, en crèche... là où ils travailleront peut-être demain.

Au final, des jeunes qui se sentent plus concernés et proposent des actions…

Ces ateliers ont permis de sensibiliser 120 élèves de 5 classes différentes, 2ndes pro et 1ère pro SAPAT et CGEA, 1èreSTAV. Un sondage a été réalisé en fin de stage auprès de l’ensemble des élèves présents. Parmi ceux qui ont répondu (83/120), 88 % des élèves sont plutôt satisfaits (en partie ou totalement) de cette partie du module « Santé et développement durable ». Ils ont particulièrement apprécié d’être acteurs lors de ce stage, d’apprendre en jouant ensemble et avec des classes mélangées, d’approfondir des connaissances sur les défis et les leviers face au changement climatique et d’échanger avec des professionnels variés. Même si le changement climatique est un thème déjà connu pour 93 % des élèves, 79 % d’entre eux se sentent désormais plus concernés et 72 % se disent prêts à changer certaines de leurs habitudes (exemple : améliorer leur tri des déchets ; faire du compost ; économiser l’eau et l’énergie...).

Certains élèves ont fait des propositions pour améliorer le projet, pour qu’il soit plus motivant pour eux et leur permette d’agir au sein ou à l’extérieur de l’établissement : ils suggèrent de renforcer le tri des déchets à la cantine, et diverses actions collectives telles ramasser des déchets, composter, planter des arbres, élever des poules au lycée pour agir dès à présent. De quoi nourrir les réflexions dans le cadre du projet d'établissement et de ses pratiques sur les transitions et l'agroécologie en cours de réflexion et d’expérimentation. La publication du dernier (le 6ème) rapport de synthèse du GIEC cette même semaine fin mars 2023 a par ailleurs montré aux élèves combien le changement climatique était effectivement une préoccupation internationale et locale d’actualité.


Contacts / En savoir plus :


 

Mai 2023 - Elodie Brébant, enseignante à l’EPL de Saint Pouange, avec l’appui de Pascaline Nobiron, enseignante et Claire Durox, animatrice Réso’them transition agroécologique de l’enseignement agricole