Février 2020 - Dominique Dalbin et Françoise Degache, animateurs Réso’them de l’enseignement agricole
Saint Affrique : une ferme expérimentale et pédagogique, outil « grandeur nature » pour l’agroécologie !
Un développement progressif de la ferme
L’exploitation, crée en 1970, s’est petit à petit étendue pour être actuellement composée de six blocs de parcelles (sur 246 ha dont 110 ha en AB) et de quatre ateliers d’élevage :
- Un atelier ovin-lait de 600 brebis Lacaune pour une production de lait vendu à Roquefort Société,
- Un atelier ovin-viande certifié AB de 80 brebis,
- Un atelier bovin-viande de 20 génisses Aubrac, certifié AB
- Un atelier équin d'une vingtaine de chevaux tous nés et élevés sur l'exploitation, dont la gestion du troupeau, le suivi de la reproduction et les inséminations sont réalisés par l'équipe enseignante.
Cet atelier permet aussi le débourrage, dans le cadre pédagogique, d'une quarantaine de chevaux appartenant à des éleveurs partenaires. Ces actions permettent à l'établissement de s'intégrer dans la filière cheval et sa valorisation.
Seuls 20 ha du site de la Cazotte sont à proximité, car après l’extension de la zone artisanale, l’exploitation a dû racheter la ferme de Serre, avant de s’étendre sur d’autres blocs.
Deux blocs de parcelle sont en agriculture biologique : la ferme Cambon (50 ha) pour le pâturage des bovins, la ferme de Peret (25 ha) pour les ovins.
La ferme de Cambon appartient d’ailleurs à la Chambre d’Agriculture, après un achat en 1998 à une productrice en AB qui « a bien voulu la céder si elle était utilisée pour des formations sur l’agriculture biologique », précise Alain Hardy. Les blocs de Peret, Sauveplane et La Jasse sont en location depuis 2014.
Des productions diversifiées sur un assolement complexe et pour de la vente directe
Des prairies sont implantées, permettant le pâturage des troupeaux et l’autonomie fourragère. 60 ha sont consacrés à la production de céréales (maïs, orge, méteil, blé, triticale, avoine) et la part des légumineuses sur l’exploitation est sans cesse en augmentation : luzernes, sainfoin, trèfle…. « Avec la juxtaposition de production en AB et en conventionnelle, ce n’est pas facile pour les rotations » avoue Alain…Dans ce système de production double, des céréales sont d’ailleurs commercialisées et bien valorisées, en particuliers les 30-35 ha de blé panifiables bio très recherchés. Et la diversification des productions ne s’arrête pas là, puisqu’une production de lentilles sur 4 à 6 ha s’est développée ces dernières années. Cette production est valorisée en circuit court, en particulier pour la restauration collective de l’établissement, comme les viandes bio.
Alain insiste : « les ateliers viande sont des ateliers support de circuits courts » puisqu’avec la présence d’un abattoir à St Affrique, ces viandes sont vendues directement en restauration collective et aux consommateurs locaux.
Une ferme expérimentale pour l’AOP Roquefort
Pour la profession et les nombreuses organisations professionnelles de l’AOP Roquefort, la ferme mène de nombreuses expérimentations, en partenariat notamment avec l’INRAe et l’IDELE, dans le cadre de projets financés par le fonds CASDAR :
- AUTELO sur la production de chiffres pour réactualiser l’alimentation ovine,
- AMTRAV'OVIN pour l’amélioration des conditions de travail en élevage ovin pour un enjeu d'attractivité et de dynamisation de la filière,
- FASTOChe pour la réduction du parasitisme grâce aux plantes riches en métabolites secondaires bioactifs chez les petits ruminants (ex : tannins du Sainfoin) ,
- ERADAL pour étudier l’efficacité protéique (transformation de protéines végétales en protéines animales et gain en intérêt nutritionnel pour l’alimentation humaine)
Des partenariats multiples au service de l’agroécologie
Pour l’élevage ovin bio, les hormones n’étant pas autorisées par le cahier des charges, des suivis « d’effets béliers » pour la synchronisation des ovulations sont en cours depuis quatre ans, grâce à des harnais électroniques.
Avec le pôle BIO Massif Central, le développement de l’outil CAPFLOR ® permet de travailler sur la composition florale des mélanges pour des praires à flore variée.
Une parcelle agroforestière montrant la complémentarité arbres-culture et élevage, financée en partie par l’Agence de l’eau Adour-Garonne, a été installée en 2016 à côté d’une haie champêtre plantée en 2009. D’ailleurs, Alain précise « depuis 2006, nous plantons au moins 200 mètres de haie par an ». Après avoir mis des arbres dans les champs, une ouverture partielle d’une forêt, en partenariat avec le Centre Régional de la Propriété Forestière va permettre du sylvopastoralisme pour les bovins viande. Une autre parcelle d’agroforesterie devrait prochainement être implantée, sur un sol moins riche.
Les cultures sont en zéro glyphosate depuis 2014, mais Alain affirme : « je suis naturaliste et il reste le problème des autres herbicides et des fongicides utilisés dans les cultures de céréales ».
La ferme fait donc partie d’un réseau DEPHY fermes (appel à projets des 30 000) pour rechercher des solutions dans les parcelles en conventionnel. L’exploitation étant équipée d’un semoir pour du semis direct, des solutions par des engrais verts ou des sur-semis en prairies sont testées pour aller vers une agriculture de conservation sans herbicides et sans labour.
L’exploitation fait également partie d’un GIEE sur l’écopathologie des animaux avec une animation par une association de vétérinaires et l’aromathérapie est de plus en plus utilisée sur les troupeaux.
Pour terminer, Alain est fier d’annoncer « on est en train de créer un gros Agro Eco Lab ». Ce projet, porté par la Chambre d’Agriculture, dans le cadre d’un groupe opérationnel-programme européen pour l’innovation (GO-PEI), permet à l’exploitation d’être innovante et vitrine de l’agroécologie, avec une véritable plateforme multithématique sur l’agroécologie en élevage : gestion des prairies, semis sous couverts, adaptation au changement climatique… De nombreux partenaires sont associés : inséminateurs, INRAe, IDELE, PNR des Grands Causses, Entente Causses&Cévennes… et pour la région Occitanie, le co-financeur, cette plateforme est complémentaire de celle de Toulouse en grandes cultures.
Signalons enfin particulièrement le travail de recoupage de parcelles, de restauration de rives, de plantation de haies transversales et de gestion de la ripisylve dans la boucle du Cambon : « il y a de nombreux cas d’érosions de ce type dans la région, il s’agit donc d’un projet pilote, soutenu par l’Agence de l’eau via le syndicat de rivière ».
Des classes impliquées dans ces projets
Les différentes classes de BTS et de licence sont amenées à participer à des pesées et exploitent les résultats des nombreux essais. Les apprenants ont également participé aux travaux de plantation et de paillage en agroforesterie. Pour Alain « l’implication des élèves est révélée par la page Facebook de l’établissement, suivie par 2 000 personnes ! ». Enfin, les mini-stages permettent aux élèves d’effectuer une permanence sur l’exploitation et les BTS organisent de nombreux projets d’initiative et de communication (PIC) sur le terrain, comme des escape-game avec des scolaires, la démonstration d’huiles essentielles en élevage par un fabricant ou la démonstration de dressage de chiens de troupeau.
Les 3 questions de fin- De quoi êtes-vous le plus fier ? " Avoir réussi à orienter la production vers l’agroécologie, une exploitation idéale étant une exploitation sans aucun produit phyto. " |
L’exploitation agricole de l'EPLEFPA de St Affrique
SAU : 246 ha dont 110 ha certifiés en AB et 160 ha en fermage,
ETP : 4 à 100% et 1 à 57% pour ECOLAB, 2 apprentis
Commercialisation : vente directe pour viandes BIO et lentilles, vente de lait de brebis à SOCIETE pour le roquefort,
Chiffre d’affaires : 304 482 € en 2018 (données ALEXIA)
Contacts utiles
Alain Hardy, directeur de l’exploitation : alain.hardy(at)educagri.fr
Site internet de l’établissement : www.la-cazotte.educagri.fr
Page facebook de l’exploitation : www.facebook.com/exploitationlacazotte